Invisibles agriculteurs!

À l’heure actuelle, en Occident, l’agriculture ne fait la machette des médias que lorsqu’elle est en crise : crise des quotas, crise de la relève, crise d’accaparement des terres, etc. Quant aux agriculteurs, dans notre société, ils font plus l’objet de téléréalité que de la véritable place d’importance qui leur revient. Cela nous semble naturel, mais en fait il n’en est rien. En effet, jusqu’au début du 20esiècle, les agriculteurs, l’agriculture et l’horticulture comestible occupaient une place de choix dans la société. C’était l’héritage d’une longue histoire d’intimité entre les humains et leur source de nourriture.

Depuis « la nuit des temps »

On oublie souvent à quel point l’agriculture a façonné notre société. On estime que les premières domestications d’animaux sauvages (on est bien loin de l’élevage intensif) se sont fait plus de 10 000 ans avant notre ère. Quant à la culture des végétaux, on estime qu’elle a commencé il y a moins de 9 000 ans. Comme les effets de la dernière glaciation se sont estompés il y a environ 12 000 ans, avant cela le climat n’était pas du tout favorable. Ces deux formes d’agriculture ont permis la sécurisation de l’alimentation. Au paravent, les humains étaient chasseurs-cueilleurs et donc leur subsistance dépendait des conditions météorologiques. Agriculture et sédentarisation ont permis de « régler » ce problème. Du coup, il a fallu « inventer » la comptabilité, l’écriture, l’organisation sociale, les lois, etc. Il aura fallu des milliers d’années, avec une accélération spectaculaire au cours des deux ou trois derniers siècles, pour mettre ce système en place. En fait, la manière dont nous vivons aujourd’hui est intimement liée à cette « révolution agricole » de la fin du néolithique.

Dans le même (long) laps de temps, les agriculteurs étaient des acteurs très présents dans la société. Comme ils nourrissaient et côtoyaient les gens au quotidien (jusqu’à la fin du 19esiècle, l’agriculture se pratiquait aux portes des villes, à moins de 2 heures de charrette), on leur prodiguait respect et estime.

 

« Au néolithique les sociétés qui vivaient dans des environnements riches en nourritures animales et végétales n’avaient pas besoin de l’agriculture. Ils restaient chasseurs-cueilleurs. C’était encore le cas au 19esiècle. »

 

Loin des yeux, loin du cœur

Jusqu’au début du 20esiècle, l’alimentation est donc encore très territoriale. Par exemple, les fruits de l’avocat étaient alors des aliments de luxe. Après la Deuxième Guerre mondiale, grâce au développement des échanges mondiaux ces légumes-fruits sont devenus des « produits de consommation courante » (on en produit aujourd’hui plus de 5 millions de tonnes par an, dont près de 30 % au Mexique). Avec l’avènement de l’agriculture industrielle mondialisée, notre relation s’est éloignée à la fois des agriculteurs et de l’agriculture. Elle est devenue un « acteur économique » alors que son rôle est très différent des vendeurs de technologiques (par exemple). Aujourd’hui, il n’est bien entendu pas question de mettre à bas l’ensemble du système. Par contre, on constate de plus en plus de dérives de ce système : utilisation toujours plus grande des énergies fossiles, destruction de la vie biologique des sols, utilisation de pesticides, etc. Une remise en cause s’impose donc.

 

Pas un modèle, mais des modèles

L’agriculture est issue d’une longue tradition. Elle a donc connu, grâce aux millions d’agriculteurs et d’horticulteurs qui l’ont pratiqué au cours des siècles, de nombreuses évolutions. C’est pourquoi les modèles émergeant de l’agriculture et de l’horticulture urbaines, des fermes bio-intensives, de la culture biologique, etc., sont en fait des évolutions tout à fait envisageables. Elles ont l’immense avantage de redonner du lustre au métier d’agriculteur et d’horticulteur, tout en recréant un lien entre les humains et leur agriculture. Les études ont aussi démontré que l’agriculture est toujours en « phase » avec le climat (ce fut le cas du Petit Âge glaciaire, survenu en Europe et en Amérique du Nord entre le début du 16esiècle et le début du 19esiècle). Les nouvelles manières de faire de l’agriculture répondent parfaitement à cette logique. Il faut donc en accéléré et en facilité la mise en place.

 

Pour une plus grande visibilité

Par la même occasion, il faut redonner aux agriculteurs et aux horticulteurs, qui après tout nous aident à nous nourrir trois fois par jour, une place de choix dans nos vies et dans la société. Pas seulement en leur disant qu’on les aime sur les réseaux sociaux. Surtout en appréciant et en respectant leur travail et en acceptant d’en payer le juste prix. En privilégiant les modèles de proximité. En n’hésitant pas à fréquenter les marchés de vente directe pour échanger avec eux. L’avenir de ce que nous mettons dans nos assiettes en dépend!

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